de Jean Nayrolles
Editions Manucius 2024
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L'objet de ce livre n'est pas de rappeler une nouvelle fois les périls qui nous menacent, mais de critiquer la raison qui les a rendus possibles. Quelles valeurs, quelles règles sociales, quels modes de pensée peuvent alors nous permettre de vivre dans un monde cohérent ? Tandis que les études consacrées au septième art se donnent le plus souvent pour tâche de désigner dans les films ce qu’il y a d’irréductiblement cinématographique, l’enquête que voici s’ouvre à d’autres sortes de conjectures pour mieux comprendre le mythe Charlot et le mythe Chaplin – qui peut-être n’en font qu’un. lire la suite |
Désignée dès 1915, un an après son apparition sur les écrans, comme le « dieu de la foule », la figure universellement reconnue et aimée du petit vagabond mérite d’être éclairée sous l’angle inhabituel de l’anthropologie religieuse. En effet, l’aspiration à un lien collectif renouvelé qui accompagna les débuts du cinéma s’est focalisée de façon fulgurante sur Charlot pour en faire une divinité incarnée. Tout au long de la filmographie de Chaplin, le personnage a suivi une trajectoire exemplaire. Depuis l’individu retors des premiers courts-métrages jusqu’à l’innocent injustement condamné, son parcours fit écho à des mythes archaïques aussi bien qu’au modèle christique. Sa fonction de victime émissaire en est arrivée à résonner jusque dans la vie même du cinéaste plusieurs fois pris pour cible par ses contemporains, et finalement exilé loin de son pays d’adoption.
Si mythe il y a, la répétition de ce qui le constitue doit pouvoir être mise au jour. Ce qui, à des distances variables et sous des formes parfois méconnaissables, se reproduit, dessine aussi une généalogie. C’est à retracer celle-ci jusque chez d’autres acteurs-réalisateurs, comme Erich von Stroheim ou Clint Eastwood, que s’attache cet essai.
Jean Nayrolles est professeur d’histoire de l’art à l’Université de Toulouse-Jean Jaurès. Ses recherches ont d’abord porté sur les phénomènes de redécouverte des arts du passé pour s’orienter ensuite vers une anthropologie historique de l’art. Il est l’auteur de deux ouvrages publiés aux éditions Kimé, Le sacrifice imaginaire : Essai sur la religion de l’art chez les Modernes (2020) et Du sacrificiel dans l’art (2019).
CHRONIQUE DE JEAN-MARC BOURDIN SUR CE LIVRE:
Charlie Chaplin, mythe cinématographique mondial
de Benoit Chantre
Editions Grasset 2023
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Fruit d’une longue recherche, avec René Girard lui-même, sa famille et ses amis proches, éclairée de témoignages brossant le portrait d’un séducteur qui aurait pu être marchand d’art à New York, d’un existentialiste converti à trente-cinq ans sur la route de Philadelphie ou de l’introducteur malgré lui de la French Theory, cette biographie intellectuelle s’appuie sur de nombreux textes inédits et une riche correspondance. Elle se lit comme le roman d’un siècle de bruit et de fureur.
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L'objet de ce livre n'est pas de rappeler une nouvelle fois les périls qui nous menacent, mais de critiquer la raison qui les a rendus possibles.
Quelles valeurs, quelles règles sociales, quels modes de pensée peuvent alors nous permettre de vivre dans un monde cohérent ?
ECOUTER - VOIR
Musée du quai Branly. Débat avec Benoit Chantre, Frédéric Keck et Rémy Labrusse
Conférence à Vincennes de Benoit Chantre
de Benoît Chantre
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Editions Grasset 2019
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Ce livre continue l’enquête sur la relation franco-allemande ouverte par Benoît Chantre avec René Girard, dans Achever Clausewitz en 2007. Il constitue aussi une introduction à l’œuvre mal connue d’un des plus grands poètes modernes.
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De 1807 à 1843, les habitants d’une ville du Wurtemberg ont vu un promeneur solitaire quitter et retrouver la maison d’un charpentier bâtie sur le rempart. Ils se sont habitués à cette figure qui murmurait tout en marchant des bribes de français ou des vers grecs.
Il s’appelait Friedrich Hölderlin. Auteur d’un roman célèbre, Hypérion ou l’ermite de Grèce, il avait été l’ami de Schelling et de Hegel. Après une grande histoire d’amour, il était parti en France et avait vécu là-bas un « bouleversement » dont ses poèmes gardent la trace. Mais ses traductions de Sophocle, publiées au retour, avaient fait rire aux larmes Goethe et Schiller : la légende du poète fou venait de commencer.
Et si la légende mentait ? Si le poète avait voulu dire autre chose en écoutant le reste de sa vie sonner les heures au clocher de Tübingen ? Dernier feu de la tradition mystique qui éclaira la nuit européenne et premier « artiste dégénéré » d’Allemagne, Hölderlin ne pouvait pas être entendu. Il le peut maintenant que les glaciers fondent et que les villes s’embrasent. Nous devons le relire, entendre la leçon de sa ténacité.
Benoît Chantre est écrivain et éditeur. Il a fondé avec René Girard, en 2005, l’Association Recherches Mimétiques (www.rene-girard.fr). Il a aussi travaillé pour le théâtre, collaboré à plusieurs revues, publié des livres d’entretiens, de nombreux articles et deux essais : Péguy point final (Le Félin, 2014) et Les Derniers Jours de René Girard (Grasset, 2016).
LIRE : ENTRETIEN BENOIT CHANTRE / ARTPRESS
ECOUTER : FRance Culture Ecrire avec Holderlin
de Jean Nayrolles
Editions Kimé 2019
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En partant d'un lien originel entre violence et art, l'auteur interroge la place de la violence sacrificielle dans la culture artistique occidentale, d'un point de vue anthropologique et historique.
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Un lien s’est noué, à l’origine, entre art et violence. Mais de quelle origine, de quel art et de quelle violence s’agit-il ? Parmi ces trois termes, seul le dernier désigne une réalité transcendante à l’intérieur de l’univers humain. Les deux autres ne s’appliquent à aucune essence fixe, mais, au contraire, sont toujours pris dans le mouvement d’une histoire. En l’occurrence, c’est l’histoire de la culture occidentale qui est explorée ici, dans une perspective à la fois anthropologique et historique, depuis la formation du monde grec jusqu’au seuil de notre modernité.
Dans la genèse des formes artistiques de la Grèce, la réalisation plastique d’une anatomie humaine apparaît et s’impose comme l’axe même de la beauté du visible en se substituant à un corps réel voué à la mort. La violence sacrificielle s’est inversée en production d’images. Un nombre impressionnant de mythes conservent le souvenir à peine voilé de ce phénomène pourtant demeuré inaperçu. De la contre-violence primordiale qui s’y dessine, les ressorts seront oubliés mais n’en demeureront pas moins inscrits dans le devenir de l’art à travers les siècles.
C’est à suivre les recompositions successives de ce lien noué aux origines que s’attache ce livre. Les huit chapitres qui le composent dessinent donc un récit, mais, considérés séparément, ils peuvent aussi être abordés comme autant d’essais autonomes, chacun décrivant une nouvelle configuration du sacrificiel dans l’art.
Jean Nayrolles est professeur d'histoire de l'art contemporain à l'Université de Toulouse-Jean Jaurès. Il a consacré de nombreuses années de recherche au mouvement de redécouverte du Moyen Age à travers la production artistique et l'historiographie des temps modernes (L'invention de l'art roman à l'époque moderne, XVIIIe - XIXe siècle, PUR, 2005). Il s'est ensuite orienté vers une approche anthropologie de l'histoire de l'art.
de Jérôme Thélot
Ed. L'atelier contemporain, 2021
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Jérôme THÉLOT, Ed. L'atelier contemporain, 2021 |
On connaît Géricault pour ses peintures de chevaux transis par la foudre, pour ses portraits d’enfants les plus troublants de l’art français, pour ses têtes de fous qui n’ont aucun équivalent dans l’histoire de la peinture, et pour son immense tableau révolutionnaire et moderne, Le Radeau de la Méduse, chef-d’œuvre du Romantisme et protestation de la vie jusque dans la mort. On sait aussi que sa vie fut brève et fulgurante, son œuvre inachevée mais géniale, et que sa mémoire fut révérée par tous les artistes du XIXe siècle. Mais on ne savait pas ce que Jérôme Thélot montre ici, que Géricault fut en outre un penseur, aussi grand qu’il fut grand artiste. Exposant la pensée interne à son art, et la « philosophie en acte » qui s’y réfléchit, cet essai dessine un portrait fascinant, en cinq chapitres qui suivent l’aventure existentielle du peintre.
On découvre d’abord dans ses premiers ouvrages de 1808 à 1814 le premier tourment de Géricault, qui fut de questionner la différence entre l’homme et l’animal, son travail se définissant alors comme « conscience de soi de la peinture », où « l’existence humaine sort de la vie par la représentation ». Ensuite, de 1814 à 1817, en particulier dans les études extraordinaires exécutées en Italie, on voit que l’artiste remonte « jusqu’au fondement de la représentation dans la violence ». Puis l’analyse du tableau de 1819, Le Radeau de la Méduse, révèle que sa « généalogie de la peinture » s’y parachève, exhibant dans la vie originaire, et dans la volonté de survie, la provenance de la violence. Au cours des années d’avant sa mort en 1824, éclate enfin la force la plus audacieuse dont le peintre fut doué – la force de la miséricorde –, qui fait la beauté irrésistible de ses lithographies, de ses portraits et de ses études de tête, où, « abaissant son art », il en a réalisé la « possibilité la plus féconde », témoignant de la « présence » d’autrui, et de la « transcendance de cette présence par rapport à toute image ». Ainsi l’essai de Jérôme Thélot manifeste l’unité profonde de l’œuvre entière de Géricault : comme connaissance de soi, critique de la violence, affirmation de la vie et lucidité de la compassion.
Editions de Minuit, 2016
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« La connaissance de soi est à la fois inutile et inappétissante. Qui souvent s’examine n’avance guère dans la connaissance de lui-même. Et moins on se connaît, mieux on se porte.
Il ne s’agit pas dans ce livre du problème de l’identité, sujet rebattu depuis l’Antiquité (et que j’ai moi-même souvent eu l’occasion d’aborder), mais du problème du sentiment de l’identité, sujet il est vrai également très rebattu, notamment depuis les analyses célèbres de David Hume.
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de Joël Hillion
Editions L'Harmattan 2019
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Lecture croisée des Sonnets et de l'oeuvre théâtrale de William Shakespeare
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La proposition de Joël Hillion, dans le prolongement de ses précédents travaux sur les Sonnets, repose sur l'idée que la transformation de Shakespeare au cours de sa carrière n'est pas le fruit du hasard mais celui de l'expérience, de son expérience unique. L'auteur pose l'hypothèse que cette expérience décisive est inscrite dans les Sonnets. Au-delà de leur rédaction, Shakespeare se libère peu à peu des contraintes imitatives et affirme sa singularité. L'analyse croisée des Sonnets et des pièces de théâtre sont une clé qui permet d'ouvrir les portes à peine closes de toute l'oeuvre.
Cet essai ne s'adresse pas en priorité aux « spécialistes ». Joël Hillion espère intéresser tout amateur de Shakespeare qui veut en savoir plus sur cet illustre inconnu. En soulevant une partie du voile sur les mystères qui entourent encore la vie et l'oeuvre du Barde, il interroge sa production pour savoir ce que Shakespeare dit de lui-même. Cet ouvrage est une sorte de portrait-robot du plus grand dramaturge et poète de langue anglaise.
Joël Hillion s'est investi depuis longtemps dans l'étude de William Shakespeare. Il est membre de l'ARM et a participé au colloque "René Girard, lecteur de Shakespeare." Il a publié plusieurs ouvrages dont Le Désir mis à nu, Le désir mimétique révélé à travers le langage de Shakespeare dans les "Sonnets" (2012); L'alter de mon égo, Empathie, mimétisme et éducation (2017).
>>> Lire la recension de Jean-Louis Salasc sur le Blog émissaire
Editions Petra (2015)
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Ce livre a pour ambition de mettre en lumière des affinités électives entre la théorie mimétique, développée par René Girard, et un ensemble de procédés esthétiques et intellectuels qui composent un nouveau cadre théorique, la poétique de l'émulation, et qui caractérisent la force des cultures shakespeariennes, autrement dit des cultures ne pouvant se définir qu'à travers le regard de l'Autre.
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De fait, le défi de la mimesis définit le noyau à partir duquel se constituent les cultures latino-américaines ou, plus généralement, les cultures formées dans des contextes non-hégémoniques. Voilà un principe de base qui définit les stratégies des cultures latino-américaines, car toutes ses sont développées en inventant des manières de s'approprier l'Autre, lequel, dans un premier temps du moins, leur a été imposé violemment.
Pour développer ces hypothèses, la première partie sera consacrée à des questions théoriques liées au défi de la mimesis: Nous explorerons ce défi par une étude de cas : la centralité de l'exil dans l'imaginaire brésilien. Enfin, la troisième partie sera centré sur des aspects prégnants de la littérature brésilienne contemporaine.
Joao De Castro Rocha
Essayiste et professeur de littérature comparée à l'Université de l'état de Rio de Janeiro (UERJ). Il a notamment écrit "Machado de Assis: por uma poética da emulaçao" (Civilizaçao Brasileira, 2013), récompensé par le Prix de la critique et de l'histoire littéraire de l'Académie Brésilienne des Lettres, et traduit en anglais sous le titre "Machado de Assis: Toward a Poetics of Emulation" (Michigan State University Press, 2015); ou encore "Culturas shakespearianas? Teoria Mimética y América Latina" (Universidad Iberoamericana/ITESO, 2014), ainsi que "Les Origines de la culture" (Prix Aujourd'hui, 2004), co-écrit avec René Girard et Pierpaollo Antonello. Il a organisé près d'une vingtaine de titres et collabore régulièrement avec la presse.
SOMMAIRE
Avant-propos
Introduction : Le défi de la mimésis : cultures shakespeariennes,
poétique de l’émulation et théorie mimétique
Première partie :
Un regard singulier : des questions théoriques
I. Cultures shakespeariennes
II. Pour une poétique de l’émulation : littérature des faubourgs du monde ?
III. Roberto Fernández Retamar : poète et penseur de « Nuestra América »
IV. L’émulation en tant que forme : une lecture de Machado de Assis
V. Théorie mimétique et cannibalisme – René Girard et Amérique Latine
VI. Littérature : aujourd’hui ? Ou le déplacement de la Bildung
Excursus
Deuxième partie :
Exil-destin : le dilemme brésilien
VII. La lyrique de l’exil : l’autre en tant que forme
VIII. « Le Brésil était la terre de l’exil » : Euclides da Cunha et le paradis perdu
IX. L’exil comme axe : accomplis et exilés ou appel à une édition critique de Racines du Brésil
X. L’homme cordial et ses précurseurs : les avant-gardes européennes
Troisième partie :
Littérature brésilienne : perspectives
XI. La littérature brésilienne aujourd’hui : un panorama
XII. La « dialectique de la marginalité » et la guerre des récits dans la culture brésilienne contemporaine
XIII. « C’est plus simple de répondre à vos questions » : la fiction de Bernardo Carvalho
XIV. Carola Saavedra : la fiction parangolé-bichos
XV. « Tant d’indulgence envers moi-même m’incommode » – Ricardo Lísias ou la fiction qui ne renonce pas
Violence des dieux, violence de l'homme
René Girard, notre contemporain
par Bernard Perret
Editions du Seuil 2023
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Boucs émissaires, violences sacrificielles, désir mimétique, autant de thèmes que René Girard (1923-2015) n’a cessé d’explorer et qui sont devenus des ressources essentielles pour notre compréhension des sociétés. L'anthropologie mimétique, dont il a posé les bases, a en effet eu des échos multiples dans les sciences humaines et les religions. .../... |
Avec ce livre, Bernard Perret, entreprend une présentation éloquente de ce vaste chantier théorique. Il éclaire notamment la fonction et la signification de la violence dans les rapports humains, des origines à nos jours, tout en explorant les liens et les différences entre la pensée de Girard et celle d'autres grands auteurs du xxe siècle (Lacan, Lévi-Strauss, Mauss …). Le lien particulier de Girard aux Écritures juives et chrétiennes, le sens à la fois novateur et controversé qu’il donne à la passion et à la mort du Christ, ne sont pas éludés, tout comme sa vision apocalyptique du politique.
En exposant la cohérence profonde et la fécondité d’une pensée majeure de notre temps, ce livre permet de ressaisir tous les débats passionnants auxquels elle a donné et donne toujours lieu.
Bernard Perret est un ingénieur et socio-économiste français. Membre du comité de rédaction Esprit, il est l'auteur de nombreux ouvrages, dont Penser la foi chrétienne après René Girard, Ad Solem, 2018 ; Pour une raison écologique, Flammarion, 2011.
Editions La Découverte, 2020
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Cet ouvrage comprend la publication des actes du colloque organisé par le MAUSS et l'ARM le samedi 16 mars 2019, au Centre Sèvres
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En matière d’horreur, l’imagination humaine est sans limites. Car seuls les humains se haïssent. Pourquoi ? La réponse de toutes les grandes idéologies politiques modernes est de type économiciste. Si seulement il y avait assez pour satisfaire les besoins de tous, la haine et les conflits disparaitraient.
C’est oublier que le besoin est sans cesse alimenté par le désir. Mais celui-ci, comment le penser ? Désirons-nous uniquement ce que désire l’autre, dans l’envie et la jalousie (Girard) ? Désirons-nous être reconnus en affirmant notre valeur (Hegel) ? Voulons-nous être reconnus à la hauteur de nos dons (Mauss) ? Est-ce de la rivalité pour être reconnu que vient le mal ? A moins qu’il ne procède de quelque chose de plus radical encore, le simple plaisir d’être en meute (Canetti).
Il est par ailleurs des colères, des violences nécessaires et légitimes. On ne peut accepter l’inacceptable. Mais jusqu’où sont-elles légitimes ? Jusqu’à la haine ? Jusqu’à ce que l’injustice subie se transforme en injustice infligée ?
Cette haine, ces désirs de meurtre, enfin, comment ont-ils été endigués ? Comment pourraient-ils l’être encore et mieux ? Par le meurtre d’une victime émissaire dénié et transfiguré en sacrifice puis en religion ? Par la réciprocité, la réciprocité positive des dons et la réciprocité négative des vengeances, peu à peu transformées en droit ? Par une démocratie enfin pleinement advenue ?
D’où vient le mal ? Comment l’apprivoiser ? C’est la question des questions, n’est-ce pas ?
Avec les textes de : M.R. Anspach, A. Caillé, Ph. Chanial, H. Clastres, L. Scubla, F. Gauthier, R. Girard, J.T. Godbout, F. Khosrokhavar,B. Perret, D. Peyrat,N. Poirier, H. Raynal, F. Robertson, C. Tarot, B. Viard
Et en @ : T. Bodammer, R. Bucaille, J.- P. Dumas, P. Dumouchel, C. Ferrié, F. Flahault, J.-É. Grésy, M. Henaff, A. Insel, M.Mottaghi,E. Secondat,M.Trévisan-Bucaille, J.-F. Véran.
Vous pouvez retrouver l'enregistrement du colloque organisé par l'ARM et le MAUSS, sur la page du site consacré à l'anthropologie et la théorie mimétique.
Voir aussi dans le Blog émissaire, l'article "La vraie mère"de Christine Orsini, qui fait une recension du dernier numéro du MAUSS.
RENÉ GIRARD
par Christine Orsini
Editions PUF coll "Que sais-je" 2017
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Une présentation éclairante dans la célèbre collection "Que sais-je". |
Agrégée de philosophie et secrétaire générale de l’Association Recherches mimétiques (ARM), Christine Orsini a contribué à René Girard et le problème du mal (Grasset, 1982) et au colloque de Cerisy « Autour de René Girard » en 1983. Elle est également l’auteur de La Pensée de René Girard (Retz, 1984).
de Benoit CHANTRE
Editions Grasset 2016
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"Ce livre raconte une amitié. Il présente l’œuvre de Girard dans la lumière rétrospective que constitue sa fin. C’est au « jour de colère » que se fait entendre la parole. La sienne et celle des textes qu’il sut génialement interpréter : les Evangiles, Shakespeare, Stendhal ou Proust garderont longtemps pour moi l’accent du Midi." Ecouter Benoît Chantre
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Présentation du livre à la librairie "La Procure"
René Girard avait écrit en 1972 : « La violence essentielle revient sur nous de façon spectaculaire, non seulement sur le plan de l’histoire, mais sur le plan du savoir. » Il s’est éteint dans la semaine qui a précédé les attentats du 13 novembre 2015. Il n’avait rien d’un prophète de malheur. Sa pensée donne forme et sens à notre avenir. Nous devons réentendre sa voix.
Il m’a fallu répondre au choc de deux événements conjoints : la mort d’un maître et d’un ami, et les horreurs parisiennes. Ces réalités constituent une énigme où se confrontent l’invisible et le monstrueux, la violence et le secret, l’élégance et l’obscénité. Elles m’ont forcé à évoquer les « derniers jours » : ceux de René Girard et la fin des temps qu’il pensa dans son œuvre.
Mais beaucoup se sont mépris sur son pessimisme. L’annonce d’un démembrement du monde révélait moins la mélancolie d’un romantique que la joie du Royaume entrevu un soir d’été en Avignon ou dans le silence parfumé de Stanford. J’ai voulu rendre présent ce penseur apocalyptique qui fut drôle et discret, dont l’espérance était profonde.
Ce livre raconte une amitié. Il présente l’œuvre de Girard dans la lumière rétrospective que constitue sa fin. C’est au « jour de colère » que se fait entendre la parole. La sienne et celle des textes qu’il sut génialement interpréter : les Evangiles, Shakespeare, Stendhal ou Proust garderont longtemps pour moi l’accent du Midi.
240 pages - EDITIONS GRASSET
Benoît Chantre est docteur ès lettres, fellow de la fondation Imitatio (San Francisco), membre associé du Centre international d’étude de la philosophie française contemporaine (CIEPFC, Rue d’Ulm), et prési- dent de l’Association Recherches Mimétiques. Il a collaboré à diverses revues (Artpress, Esprit, L’Infini, La Revue des deux mondes...), écrit sur des artistes contemporains et organisé des colloques univer- sitaires ou des rencontres d’écrivains, à Paris et à la Villa Médicis. Ses recherches portent sur les œuvres de Bergson, Girard, Levinas, Péguy et Simone Weil. Il a publié en 2007 avec René Girard Achever Clausewitz (réédition « Champs », Flammarion, 2012), en 2014 un essai sur Péguy aux Editions du Fé- lin (Péguy point final) et en 2016 Les Derniers jours de René Girard aux Editions Grasset.
Editions du Seuil, 2016
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Trop souvent, on traite la jalousie et l’envie comme si elles étaient interchangeables. Rien n’est plus faux. Ce livre part de la théorie du désir mimétique de René Girard : le sujet envie le modèle qui a éveillé en lui le désir pour un objet que pourtant ce modèle se réserve. Il n’y a pas de désir sans rivalité ni de rivalité sans désir. Or cette théorie échoue à rendre compte de la jalousie. Élucider cet obstacle conduit à mettre en question le caractère universel du désir mimétique.
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Celui-ci prend au départ la forme d’un triangle : le sujet, le modèle et et l’objet. Or la jalousie relève d’une tout autre géométrie : on souffre d’être exclu d’un monde qu’on voit se clore sur soi-même. Dans la jalousie amoureuse, ce monde est formé par l’étreinte des deux amants. Don Giovanni n’imite ni n’envie le paysan Masetto, qu’il méprise ; mais il ne peut supporter le cercle amoureux qu’il forme avec Zerlina. Son désir commence par la jalousie. Celle-ci est, comme chez Proust, antérieure au désir.
Nourri de littérature, de philosophie et d’expériences personnelles, ce livre débouche sur une théorie générale de la jalousie, cette souffrance tenue pour une composante indépassable de la condition humaine. Une postface d’Olivier Rey met cette théorie à l’épreuve de la psychanalyse.
Philosophe, Jean-Pierre Dupuy est professeur émérite à l’École Polytechnique et professeur titulaire à l’université Stanford (Californie). Il est l’auteur d’une quarantaine d’ouvrages dont Petite Métaphysique des tsunamis (Seuil, 2005, Points, 2014) et L’Avenir de l’économie. Sortir de l’économystification (Flammarion, 2012).
Postface d'Olivier Rey.
Chargé de recherche au CNRS, membre de l’Institut d’histoire et de philosophie des sciences et des techniques à Paris, Olivier Rey a enseigné les mathématiques à l’École polytechnique, et enseigne aujourd’hui la philosophie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Il a publié récemment un essai, Une question de taille, et un roman,Après la chute.
Editions Editions Vrin (2015)
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Annexe II : « Violence et pardon : Girard, Levinas et au-delà ».
Jean-Luc Marion, de l’Académie française, est professeur émérite de l’Université Paris- Sorbonne et Andrew Thomas Greeley Professor à The University of Chicago > écouter Jean-Luc Marion au colloque René Girard- Emmanuel Levinas, (ARM / Ecole normale supérieure, 201 |
de Jean-Pierre Dupuy
Editions du Seuil, 2021
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Jean-Pierre Dupuy a tenu pendant la pandémie un " journal de pensée " d'un genre spécial : il réagit moins aux événements que nous avons tous vécus depuis le mois de mars 2020 qu'à la manière dont ces événements ont été analysés, discutés. Il le fait à la lumière de sa contribution majeure à la pensée de la catastrophe développée dans un livre fameux et souvent mal compris, Pour un catastrophisme éclairé. Quand l'impossible est certain (Seuil, 2002 ; 2004).
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Dans l'émission "La terre au carré", Jean-Pierre Dupuy cite Karl Jaspers pour désamorcer le principe de certitude dans le catastrophisme.
Ecouter l'émission sur France Culture de Laure Adler 15 mars 2021
Ce qui se profile derrière la crise
de Bernard Perret
Editions Desclee de Brouwer, septembre 2020
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Un virus nous a pris par surprise, mais nous risquons d’être plus démunis encore face à la catastrophe écologique. Dans les deux cas, notre impréparation est d’abord mentale. Comment penser un autre récit du futur ? Comment intégrer l’irréversible dans une vision sensée de l’avenir ? Bernard Perret explore ici les ressources de la pensée apocalyptique, qui invite à considérer l’histoire humaine comme une aventure dont nous ne maîtrisons ni le déroulement ni le sens. |
Une philosophie de l’événement, qui donne toute sa place aux événements dramatiques et inattendus et à leur capacité à susciter de nouvelles avancées de civilisation, peut nous y aider. La réflexion proposée dans cet essai, inspirée des travaux de René Girard, Norbert Elias et Charles Taylor, tente ce pari. Face à la crise où nous sommes entrés, tout laisse à penser que nous avons perdu la main. Mais rien ne nous interdit de penser qu’un nouveau monde pourrait émerger de notre créativité culturelle et spirituelle.
Bernard Perret est essayiste. Ses travaux touchent des sujets très variés : questions économiques et sociales, écologie, anthropologie sociale, christianisme. Il a publié de nombreux ouvrages, parmi lesquels : L’Économie contre la société (avec Guy Roustang ; 1993 ; rééd. 2001) ; La Logique de l’espérance (2006) ; Vers une raison écologique (2011) ou Penser la foi chrétienne après René Girard (2018).
de Jean-Pierre Dupuy
Editions Desclée de Brouwer 2018
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Nous sommes plus près d'une guerre nucléaire que nous ne l'avons jamais été pendant la Guerre froide, mais la plupart des gens sont aveugles à ce danger. Ils ont appris que les armes nucléaires ne servent qu'à une chose : empêcher que les autres les emploient. C'est ce qu'on appelle la dissuasion. Ils pensent aussi que ces armes sont trop destructrices pour qu'on soit tenté de les utiliser. Telles sont les illusions qui leur permettent de dormir tranquilles.
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Entre l'été 2017 et janvier 2018, nous avons plusieurs fois frôlé une guerre nucléaire que ses protagonistes, Donald Trump et Kim Jong Un, ne voulaient nullement, pas plus que ne la voulurent Kennedy et Khrouchtchev pendant la crise de Cuba. Les intentions des acteurs comptent en effet très peu. Des « machines apocalyptiques » décident aujourd'hui pour nous, des systèmes de déclenchement semi-automatique où le faux calcul, la mauvaise interprétation ou l'accident jouent un rôle déterminant.
On repose donc ici à nouveaux frais la question de l'efficacité et de la moralité de l'arme nucléaire.
Jean-Pierre Dupuy est professeur à l'Université Stanford. Il est l'auteur de très nombreux ouvrages, parmi lesquels : L'Enfer des choses. René Girard et la logique de l'économie (avec Paul Dumouchel, 1979) ; La Panique (1991) ; Le Sacrifice et l'envie (1994) ; Pour un catastrophisme éclairé (2002) ; Petite métaphysique des tsunamis (2005) ; La Marque du sacré (2010) ; L'Avenir de l'économie (2012) ou La Jalousie. Une géométrie du désir (2016).
>>> VOIR
Emission RFI du 23 janvier 2019 "Facebook, mimétisme et catastrophe"
Analyse de Octave Larmagnac Matheron dans Philosophie magazine
de Jérôme Lèbre
Editions Desclée de Brouwer 2019
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Le présent essai, qui tente de penser la prolifération actuelle des provocations, des scandales et des affaires, s'inspire de façon neuve et originale de la théorie girardienne du scandale.
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De Cahuzac à Benalla, les scandales suivent le rythme du monde ou participent à son accélération. Ils se diffusent par Internet, entraînant révélations et réactions instantanées. Au point que nous ne faisons plus la différence entre le vrai scandale et la provocation artificielle.
Rien ne semble alors nous arrêter, ni dans la transgression ni dans la défense des règles, qui fragilise plus qu'elle protège. Scandaliser ou se scandaliser n'est pas réservé aux extrémistes. Nous sommes tous guettés par un conformisme qui engendre à son tour des scandales financiers, humanitaires, écologiques…
C'est en résistant à cette multiplication de provocations, de scandales et d'affaires que nous pourrons faire apparaître le motif de cet emballement : un désir de justice qui affirme pour tous un droit à l'existence sur une Terre fragilisée. Que des êtres singuliers fassent de ce désir un droit, c'est la condition même de la démocratie.
Jérôme Lèbre ancien élève de l'École normale supérieure, est membre du Collège international de philosophie. Il a publié plusieurs ouvrages, parmi lesquels : Vitesses (2011) ; Derrida – La justice sans condition (2013) ; Les Caractères impossibles (2014) ; avec Jean-Luc Nancy, Signaux sensibles (2017) ; et plus récemment, Éloge de l'immobilité (2018).
Dans le cadre de "La Caméra du philosophe" (ARM/ ICP), Jérôme Lebre analysera le 5 février 2020 le film Homo Faber (Trois femmes) de Richard Dindo.
>>> Lire l'article "Du bon usage du scandale dans la démocratie" de Jérôme Lebre sur iPhilo
Editions du Seuil, 2016
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Les robots sociaux sont conçus pour fonctionner au sein de milieux façonnés, contrôlés et occupés par des êtres humains. Leur apparence physique n’est pas faite pour tromper : ils restent aux yeux de tous des robots qui ne « singent » pas l’homme. Il est pourtant possible de leur conférer une individualité. Les recherches les plus avancées visent à les rendre capables d’émotions et à les doter d’empathie. |
La robotique sociale tend à créer des substituts, des robots susceptibles de nous remplacer dans certaines tâches, mais sans pour autant qu’ils prennent notre place. La majorité des objets techniques omniprésents dans notre vie demeurent invisibles tant qu’ils fonctionnent correctement. La présence active, qui est la condition essentielle de leur rôle de substitut, est au contraire la caractéristique centrale des robots sociaux.
Ce livre dessine les traits d’une transformation technique, sociale et culturelle déjà en cours de réalisation, une relation de coévolution qui n’a jamais eu de précédent dans l’histoire de l’humanité. Cette relation avec des créatures artificielles dotées de compétences sociales et capables de remplir des rôles sociaux va conduire l’humanité à une bifurcation où des formes neuves de socialité seront susceptibles de surgir.
de Jean-Marc Bourdin
Editions l'Harmattan 2019
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René Girard s'est toujours défié de la philosophie. Son anthropologie fondamentale laisse en grande partie le politique de côté. Il n'ignore pourtant pas que les hommes aspirent à la concorde civile et à la paix des nations. Et le rôle central du désir mimétique lors de l'émergence des sociétés modernes, soucieuses d'une égalisation croissante des conditions, l'oblige à produire une philosophie politique originale. Elle met en évidence que l'égalité, loin d'apaiser, est une des causes principales de la rivalité.
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Jean-Marc Bourdin est docteur en philosophie de l'Université Paris 8. Il est également l'auteur du Duchamp révélé et de L'art contemporain à l'épreuve de la théorie mimétique en 2016. Il dirige le" Blog émissaire" de l'ARM.
> Lire l'interview de Jean-Marc Bourdin dans le Blog émissaire
de Jean-Marc Bourdin
Editions l'Harmattan 2019
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Contrairement à l'idée selon laquelle l'égalité rendrait sans objet les convoitises et éliminerait les occasions de conflit, elle les suscite : le paradigme des frères ennemis vaut entre les hommes comme entre les peuples. Une histoire mimétique vient le confirmer. L'anthropologie fondamentale de René Girard se révèle ainsi apte à unifier les disciplines qui prolifèrent dans le champ des humanités pour reposer à nouveaux frais la question majeure du politique : la contention de la violence.
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Editions L’Iconoclaste(2015)
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Ouvrage écrit dans le sillage d’Achever Clausewitz et dédié à René Girard.
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de François Hien
Cahiers de l'ARM Editions Petra
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La crèche "Baby-Loup", dans les Yvelines, est une association hors norme : dirigée par l'exilée chilienne Natalia Baleato, elle est la seule crèche de France ouverte 24 heures sur 24. Située dans un quartier réputé difficile, elle embauche des femmes sans qualification à qui elle permet d'obtenir un diplôme.
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Compte-rendu de Christine Orsini, Secrétaire générale de l'ARM :
Voici un livre tout à fait remarquable : exemplaire sur le plan de la méthode, associant à l’enquête sur le terrain le travail de la recherche en amont et celui de la réflexion en aval, il devrait servir de modèle à tous les journalistes d’investigation. Au-delà de sa qualité professionnelle, le livre de François Hien est de ceux qui impriment leur marque sur le lecteur, un livre qui change votre regard, non seulement sur l’objet qu’il examine, qui fut un objet de débats passionnés, mais surtout sur vous-même, que vous ayez ou non participé à ces débats. Je tiens absolument à le dire, c’est un livre qui vous rend meilleur.
François Hien s’est emparé d’une histoire de voile islamique, qui a duré de 2008 à 2013 et reste, du fait de son sujet, d’une « brûlante actualité » : l’affaire de la crèche Baby Loup. Comme l’indique le titre du livre, le but de l’auteur n’est pas seulement de comprendre comment un fait divers local est devenu une « affaire » nationale mais de remédier autant qu’il est en son pouvoir, à un mal qui ronge de l’intérieur autant les individus que les sociétés ; quel que soit le nom qu’on lui donne, islamophobie, antiracisme ou ressentiment de populations marginalisées, ce mal se signale par la haine de l’Autre, dont la face cachée pourrait bien être la haine de soi. La démarche éthique, ici, est inséparable de la démarche de connaissance : c’est une des leçons à tirer de ce livre qui n’en donne aucune, le diable est moins dans les « détails » que dans les généralités. Il ne faut jamais lâcher le réel. L’imprécision est le terreau idéal du mensonge qui ne se reconnaît pas comme tel, le mensonge à soi-même.
C’est donc avec une extrême précision que l’auteur nous relate les faits et leurs interprétations, qui participent à la dynamique du conflit et qu’il traite comme des faits. Il y a celles des théoriciens, celles des journalistes, celles des acteurs du drame. L’hyper médiatisation de l’affaire a eu une influence sur son déroulement, ainsi que les décisions de justice. Plus encore que les faits, les mots par lesquels on les désigne nourrissent le conflit, ils donnent une (fausse) identité à chaque camp : d’un côté, le camp de la laïcité, de l’autre, celui de l’antiracisme. L’auteur montre qu’en réalité, l’affrontement mettait en jeu deux interprétations de la laïcité, deux conceptions opposées du féminisme et fut celui de deux corps sociaux blessés dont chacun attribuait à l’autre l’entière responsabilité de ses désordres internes. L’auteur dévoile la complexité de l’affaire, complexité dont les hésitations de la justice témoignent et qui contraste avec le simplisme dogmatique et le manichéisme des deux camps. La fin de l’affaire judiciaire en 2013 et le déménagement de cette crèche hors-normes, qui fut longtemps la fierté de sa commune, n’ont pas mis un terme à l’escalade du ressentiment, au contraire.
François Hien a lu René Girard. Cela lui permet de voir d’emblée, en l’identifiant à une situation romanesque, que la relation entre Fatima, la rebelle voilée, et Natalia, la directrice féministe de la crèche ne peut être ramenée à un conflit idéologique ni même à une lutte pour le pouvoir. Sans y être inféodé, l’auteur fait appel aux outils girardiens, concepts et analyses, pour rendre manifeste ce que les haines et les ressentiments dissimulent : la symétrie (toute relative, puisque les deux camps ne sont pas de force égale) des accusations et des positions ; chaque camp se dit « en défense », se présente comme la victime de l’autre, ce qui légitime la violence de ses attaques. On voit le risque d’une « montée aux extrêmes », en cas de défaillance des institutions chargées de contenir la violence. Le « mécanisme du bouc émissaire » ne peut plus fonctionner pour apaiser les tensions : chaque camp se dit le « bouc émissaire » de l’autre. Nous avons cependant la liberté de nous extraire du « jeu ». Par ce petit livre, à l’écriture soignée, que vous lirez comme un roman, François Hien contribue effectivement à une « désescalade » et tout lecteur de bonne volonté ne peut que lui en être infiniment reconnaissant.
La crèche "Baby-Loup", dans les Yvelines, est une association hors norme : dirigée par l'exilée chilienne Natalia Baleato, elle est la seule crèche de France ouverte 24 heures sur 24. Située dans un quartier réputé difficile, elle embauche des femmes sans qualification à qui elle permet d'obtenir un diplôme.
Jusqu'en 2008, cette crèche était un outil social apprécié par tout un quartier. Mais en 2008, Fatima Afif, directrice adjointe de la crèche, revient d'un long congé parental entourée d'un grand voile islamique, qu'elle refuse de retirer alors que le règlement intérieur lui impose la neutralité religieuse. Elle est licenciée et porte plainte pour discrimination.
Cinq jugements ont été rendus jusqu'en 2013. Militants, philosophes, intellectuels, journalistes, responsables religieux se sont emparés de la question. À partir d'une enquête de terrain et des outils empruntés à la théorie mimétique de René Girard, François Hien s'efforce de comprendre la nature de ce conflit, en défaisant les représentations archétypales que chaque camp s'est construit de l'autre.
Sommaire:
Introduction
L'Affaire Baby-Loup
Le choix de Fatima Afif
Laïcité contre laïcité
La critique immanente
Féminisme contre féminisme
Les prophéties auto-réalisatrices
Stéréotypes d'accusation
Boucs émissaires partout, justice nulle part
Être de bonne volonté
François Hien est réalisateur de documentaires, auteur pour une compagnie de théâtre et intervenant dans le champ de l'éducation populaire. Ayant repris voici cinq ans des études de philosophie par correspondance, il a consacré ses deux mémoires de Master à René Girard. Il a écrit une pièce de théâtre adaptée de l'affaire Baby Loup et prépare un long métrage de fiction, qui sera tourné à Saint-Etienne.
Plus d'informations sur : www.francoishien.fr
>>> Acheter sur le site de l'éditeur (15 euros - port gratuit)
François Hien parle de son livre et de son travail théâtral
De qui souffrez-vous ?
de Jean-Michel Oughourlian
Editions Desclee de Brouwer, septembre 2020
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Après le succès de son livre, Notre troisième cerveau, Jean-Michel Oughourlian s’attache à démontrer que les mécanismes toxiques et pathogènes à l’œuvre dans les maladies physiques et dans les troubles mentaux ont une cause commune : l’altérité. La vraie question n’est donc pas : De quoi souffrons-nous ? mais bien : De qui souffrons-nous ?
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Altérité exogène, comme dans les maladies infectieuses, ou altérité endogène, comme dans les cancers. Mais altérité fluctuante en psychopathologie, tantôt modèle et amie, tantôt rivale et ennemie. Comme les cellules cancéreuses dissimulent leur agression sous le masque de certains enzymes, l’altérité ennemie, dans les psychoses et les névroses, se cache sous des symptômes qu’il faut savoir décrypter.
Guérir de maladies physiques, ou mettre fin à des désordres psychologiques, consiste à reconnaître cette altérité rivale. Mais il ne faut pas se tromper d’adversaire : prendre l’ami pour l’ennemi ou l’ennemi pour l’ami. Dans cette petite histoire de l’altérité émaillée d’exemples, on montre comment éviter la méconnaissance et s’ouvrir à une vraie relation.
Jean-Michel Oughourlian a été neuropsychiatre à l’Hôpital américain de Neuilly et professeur de psychopathologie à la Sorbonne. Il a élaboré une psychothérapie sur la base de ses recherches avec René Girard dans Des choses cachées depuis la fondation du monde, en 1978, et publié de nombreux ouvrages, parmi lesquels : Un mime nommé désir (1982), Genèse du désir (2007), Notre troisième cerveau (2013) ou Cet autre qui m’obsède (2017).
de Jean-Michel Oughourlian
Editions Plon 2019
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L'objet de ce livre n'est pas de rappeler une nouvelle fois les périls qui nous menacent, mais de critiquer la raison qui les a rendus possibles.
Quelles valeurs, quelles règles sociales, quels modes de pensée peuvent alors nous permettre de vivre dans un monde cohérent ?
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Elles sont six, réparties entre Nantes, Le Mans, Tours et Cholet. Six usines où sont fabriqués les systèmes de câblages électriques équipant des voitures haut de gamme. Leur particularité ? Tous les opérateurs (700 sur un effectif de 830 personnes) sont porteurs de handicaps mentaux, trisomie 21, autisme, de schizophrénie, de retards cognitifs importants... Pourtant, ils travaillent tous. Ils ont un salaire, des contraintes ; en somme une vie professionnelle " normale " et un objectif : la réinsertion en milieu " classique " (usine, entrepôt, commerce...).
Le psychiatre Jean-Michel Oughourlian s'est immergé dans ces extraordinaires " usines apprenantes " de la Fondation AMIPI-Bernard Vendre. Son constat ? " L'usine réussit là où la psychiatrie a échoué. A l'hôpital, beaucoup parmi ces opérateurs seraient des légumes. Là, ils progressent. " Qu'est-ce que l'intelligence ? Comment le travail manuel peut-il agir sur les neurones et les synapses du cerveau ? Quel rôle tient le mimétisme dans la " normalisation " de ceux que l'on appelle handicapés ? S'appuyant sur des études neurologiques, ce livre est d'abord un récit.
L'histoire de celles et ceux qui, comme Bernard Vendre, eurent un jour droit à ce verdict terrible : " Débile il est, débile il restera. " Mais " débiles ", ils ne le sont pas...
Editions du Cerf 2021
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Voici la plus émouvante des confessions, le plus dérangeant des témoignages et la plus importante des réflexions sur l’homosexualité au sein de l’Église.
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Anglais converti au catholicisme, devenu prêtre par vocation, et bien avant d’être reconnu comme un théologien majeur, James Alison a décidé de ne plus être le complice du mensonge ecclésiastique. Maintenu, malgré tout, dans son sacerdoce par l’intervention personnelle du pape François, ce spécialiste de René Girard, et donc de la violence et du sacré, nous met au défi, à la première personne, de l’entendre sur la foi en tant que “gay”. Passant de l’exégèse à l’anthropologie, de la réflexion biblique sur les fausses interprétations de l’amour au récit personnel sur les épreuves avec l’institution, ce livre crucial sur la richesse de la vie, sur l’acceptation de soi, sur le pardon, constitue aussi une méditation universelle sur le ressentiment et sur l’antidote qu’offre l’Évangile.
Une démonstration éblouissante de la vitalité du christianisme au xxie siècle.
Théologien catholique de réputation internationale, enseignant à Madrid, spécialiste de René Girard, James Alison s’est illustré par ses travaux novateurs sur les questions LGBTQI+.
James Alison présente son livre "La foi au-delà du ressentiment. Fragments catholiques et gays", au cours d'un entretien avec Benoît Chantre
TOWARDS RECONCILIATION
Understanding Violence and the Sacred after René Girard
de Paul Gifford
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Why do humans sacralise the causes for which they ght? Who will decipher for us the enigma of ‘sacred violence’? Paul Gi ord shows that the culture theorist and fundamental anthropologist René Girard has in fact decoded the obscurely ‘foundational’ complicity between violence and the sacred, showing why it is everybody’s problem and the Problem of Everybody.
Ecouter Paul Gifford
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Why do humans sacralise the causes for which they ght? Who will decipher for us the enigma of ‘sacred violence’? Paul Gi ord shows that the culture theorist and fundamental anthropologist René Girard has in fact decoded the obscurely ‘foundational’ complicity between violence and the sacred, showing why it is everybody’s problem and the Problem of Everybody.
Girard’s mimetic theory, especially his neglected writings on biblical texts, can be read as an anthropological argument continuous with Darwin, shedding formidable new light to a vast array of dark and knotted things: from the functioning of the world’s oldest temple to today’s terrorist violence, from the Cross of Christ to the Good Friday Agreement. . . Such insights illuminate superbly (‘from below’) the ways of creation, revelation, redemption – which is to say, ultimately, the Christian enterprise and vocation of Reconciliation.
Here is a novel and exciting resource for scanning the hidden ‘sacri cial’ logic that still secretly shapes cultural, social, and political life today. Girard puts us ahead of the game in the key dialogues required if we are to avoid auto-generated apocalypses of human violence in the world of tomorrow.
Paul Gifford is Buchanan Professor of French (emeritus) and Director of the Institute of Cultural Identity Studies, at the University of St Andrews. He has also taught at the Universities of Toulouse, Ulster, Western Ontario and Stanford Ca. He knew and worked with Rene Girard: as Invited Scholar at Stanford University (2007), and as elected Visiting Research Fellow of the Girardian Foundation Imitatio (2009-12).
de James Alison
Editions Artèges 2019
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Connais-tu Jésus ? As-tu une relation personnelle avec le Christ ? Comment le fait qu'il soit ressuscité change-t-il ta vie ? Ces questions sont sans aucun doute au coeur de toute vie chrétienne. James Alison y répond avec sa clarté et sa pédagogie habituelles. En disciple de René Girard, il renouvelle en profondeur la compréhension du sacrifice du Christ, victime qui pardonne, et montre comment l'expérience pascale peut bouleverser notre existence.
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Afin de favoriser la méditation, l'auteur propose à la fin de chaque chapitre une série de questions.
James Alison est un prêtre catholique anglais, théologien et écrivain. Il s'est fait connaître par ses travaux sur les applications de la théorie mimétique à la théologie. Il est l'auteur de nombreux ouvrages traduits en différentes langues, dont 12 leçons sur le christianisme paru en 2015 chez Desclée de Brouwer.
de Bernard Perret
Editions Ad Solem 2018
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L'œuvre de René Girard a remis l'anthropologie religieuse au goût du jour et a influencé en profondeur d'autres domaines des sciences humaines et sociales. Son apport à l'intelligence de la foi chrétienne est considérable : en montrant comment la Passion du Christ dévoile les ressorts de la violence constitutive des sociétés, Girard a éclairé la singularité des Evangiles par rapport aux mythes fondateurs de la culture humaine.
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Un nombre croissant de théologiens se sont emparés de sa pensée pour reposer les questions du mal, du sacrifice et de la Rédemption. L'un des bénéfices de cette lecture des Evangiles est de souligner la cohérence entre la prédication du Royaume et la signification des circonstances de la mort de Jésus. Plus largement, elle permet de lire les textes bibliques comme la découverte progressive de la non-violence de Dieu.
Ce livre est d'abord une présentation des enjeux de la pensée de René Girard pour le christianisme et un premier bilan des théologies qui s'en inspirent. L'auteur conduit ensuite une réflexion plus personnelle sur les rapports entre anthropologie et théologie. Il montre comment la théorie de Girard permet de penser les relations entre religion et violence, et il interroge le sens du rituel chrétien dans un contexte de sécularisation.
Bernard Perret répond à 3 questions à propos de son livre (3X 5mn)
Bernard Perret est essayiste et vice-président de l’ARM. Il a mené une double carrière de haut-fonctionnaire et de chercheur en sciences humaines. Ses travaux touchent des sujets variés : questions économiques et sociales, écologie, anthropologie sociale, christianisme. Il a publié de nombreux ouvrages, parmi lesquels : L'Economie contre la société (avec Guy Roustang ; 1993 ; réed. 2001) ; La Logique de l'espérance (2006) ; Vers une raison écologique (2011).
de James Alison
Editions Deslée de Brower 2015
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"Ces « leçons » sont une très agréable surprise, sur la forme et le fond. Très lisibles, très alertes, bourrées de comparaisons et d’images parlantes, non dépourvues d’humour anglo-saxon, elles ont sur le lecteur un effet entraînant qui manque, hélas, à beaucoup de livres de théologie même « bons », mais souvent gris et bas comme un ciel de novembre. |
Cette dimension « existentielle » omniprésente est due aussi au commentaire, très vivant et coloré, original aussi, de textes bibliques et évangéliques aussi dérangeants que consolants, quiillustrent chaque étape du parcours (à commencer par le premier, vraiment magnifique, des « pèlerins d’Emmaüs »).
Alison est un « girardien », marqué donc par la « théorie mimétique » de René Girard, qu’il l’utilise avec discrétion et sans lourdeur alors même qu’elle est omniprésente et que son livre en montre toute la justesse et la fécondité. Particulièrement frappantes et « libérantes », à cet égard, les nombreuses pages où il désigne et décrit l’une des grandes maladies du christianisme : le ressentiment, le désir de vengeance et leurs multiples miasmes, ainsi que les voies pour sortir de ce cercle maléfique. Emblématique de ce programme, le titre du dernier chapitre : « Qu’est-ce qu’habiter un commandement non moralisant ? » Jean-Louis Schlegel
James Alison est prêtre catholique anglais, théologien et écrivain. Il est fellow de la Fondation Imitatio et responsable du Département éducation de cette fondation. Il est reconnu pour ses travaux sur les applications de la théorie mimétique à la théologie. Il a étudié chez les Dominicains à Oxford. Il est l'auteur de nombreux ouvrages en anglais, dont plusieurs ont déjà été traduits en différentes langues. Il réside actuellement à São Paulo, Brésil.
Vidéo (7mn) : " Interview de James Alison sur sa relation à l'oeuvre de René Girard"
https://www.youtube.com/watch?v=qIRpXWNURYg
Vidéo (19mn) : Intervention de René Girard à la conférence/ débat clôturant la « Chaire René Girard 2009 » au Collège des Bernardins :"Fécondité de la pensée de René Girard pour le christianisme"
La Croix par le père David Roure
"Ce dominicain anglais réussit son pari de présenter le christianisme de manière inattendue et vivifiante"
"Un des attraits, et non des moindres, du livre de James Alison, est l’humour typiquement britannique avec lequel il s’exprime. Ainsi, il illustre des notions et des réflexions qui, dans leur abstraction, seraient ardues et rébarbatives, par des exemples tirés de l’actualité politique ou culturelle. .../... lire la suite
L'objet de ce livre n'est pas de rappeler une nouvelle fois les périls qui nous menacent, mais de critiquer la raison qui les a rendus possibles.
Quelles valeurs, quelles règles sociales, quels modes de pensée peuvent alors nous permettre de vivre dans un monde cohérent ?
Editions Albin Michel (2015)
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La pensée de René Girard est ici convoquée à plusieurs reprises. > Critique de PAtrice Trapier (Journal du dimanche 30/08/2015) Par temps de crise (nous y sommes depuis plus de trois décennies), la science économique est une matière valorisée (ses experts sont écoutés comme des Pythies) et instable (leurs oracles sont sans cesse démentis par les imprévisibles tête-à-queue des mutations en cours). Daniel Cohen évite ce jeu infernal (prédire demain au futur de l'impératif) pour s'en tenir à son travail d'intellectuel (tenter de comprendre, au conditionnel, |
ce qui relie hier à demain, plus sûrement à après-demain).
Agrégé de maths et d'économie, Cohen sait s'extirper de l'asséchant tête-à-tête avec les interminables colonnes chiffrées des bilans etpour enrichir ses analyses grâce à son goût prononcé pour l'histoire, l'anthropologie, la philosophie et la psychanalyse. Le titre de son dernier ouvrage (Le monde est clos et le désir infini) est inspiré par le philosophe des sciences, Alexandre Koyré (Du monde clos à l'univers infini). Son sujet (la société sans croissance) traduit une inflexion. Il a longtemps pensé que la croissance était notre bien le plus précieux ; qu'en son absence, tous les périls guettaient, avant d'admettre que son affaiblissement régulier était moins la variable passagère d'une adaptation à la mondialisation que la résultante structurelle de l'avènement de la société numérique.
Un troisième big bang, la société numérique
Après tout, la croissance est une idée nouvelle. Cohen nous rappelle deux enseignements du temps long : 1/Considérer que ces trente dernières années tellement chahutées sont une tête d'épingle à l'échelle de l'humanité. 2/Prendre en compte l'accélération considérable des processus humains : il y a dix millions d'années, apparaissaient les hominidés ; il y a un million d'années, l'Homo erectus ; il y a cent mille ans, l'Homo sapiens ; il y a dix mille ans, l'agriculture ; il y a mille ans, l'imprimerie ; il y a cent ans, l'électricité ; il y a dix ans, Internet. Jusqu'où nous mènera ce mouvement vertigineux?
Après le premier big bang, l'agriculture, qui a entraîné la première explosion démographique et une cascade d'inventions, de l'écriture à la poudre ; après le deuxième big bang, la révolution scientifique du XVIIe siècle, qui a ouvert la voie à la révolution industrielle, à la croissance économique et à son pendant spirituel, l'idée du progrès, nous abordons un troisième big bang, la société numérique post-industrielle qui clôt la parenthèse industrielle. Et, c'est toute la question, son culte de la croissance et du progrès, qui avait succédé aux religions toutes puissantes. Il n'est d'ailleurs pas anodin que l'actuelle décroissance s'accompagne d'une remontée des sentiments religieux extrêmes.
Faut-il se préparer à vivre durablement sans croissance? Cohen présente les deux scénarios. 1/Pessimiste : la révolution numérique détruira près de la moitié des emplois (et toutes les tâches répétitives) et ne servira qu'à mieux organiser la vie des plus aisés sans rien bouleverser fondamentalement de notre univers (aucune invention comparable à l'automobile ou à l'électricité). 2/Optimiste : après une période de destruction-adaptation, l'alliance d'Internet et de la biologie (voire de l'énergie) ouvrira des perspectives inouïes, notamment du côté de l'allongement de la vie, qui bouleverseront les conditions de l'activité économique, et donc de la croissance.
De nouvelles formes de progrès sans croissance
Sans trancher, même s'il laisse deviner sa crainte que le scénario pessimiste soit le plus probable, Daniel Cohen constate que le monde post-industriel explose tous les cadres stables, que la montée des inégalités n'est pas seulement salariale mais surtout patrimoniale, qu'après un capitalisme unificateur vient le temps d'une fragmentation des richesses, des territoires et des individus.
En héritier des Lumières, prônant l'équilibre entre partage collectif et initiative individuelle, Daniel Cohen essaie de penser de nouvelles formes de progrès sans croissance, à l'heure où le défi climatique peut permettre de réunifier des sociétés luttant contre la tentation de l'affrontement. Il le fait en tenant compte des enseignements de René Girard (sur le danger du bouc émissaire) et de Sigmund Freud (sur le désir humain jamais assouvi). Ce livre, en même temps érudit et d'une lecture très abordable, est un guide essentiel pour temps troublés.
Editions Desclee de Brouwer 2019
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Notre avenir sera si riche que nous n'avons pas à nous soucier des dettes qui s'accumulent : elles seront effacées par les performances du futur. Et si l'homme est un être nuisible qui a dévasté la planète, il pourra sans problème être régénéré et «augmenté » par les miracles de la technologie. Telles sont les promesses que nous fait le capitalisme spéculatif.
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Depuis près d'un demi-siècle, cet esprit malin a saisi la sphère financière, puis l'économie réelle, et enfin la société tout entière. Il a bouleversé le travail, la consommation, les entreprises, les mentalités et la vie quotidienne pour produire une société matérialiste, fébrile et fataliste. Rebondissant à chaque crise, il a pris la forme de la financiarisation, puis de la digitalisation. Il prépare déjà sa nouvelle mue.
À chaque fois, il nous fait espérer un avenir qui nous sauvera, tout en nous susurrant que l'être humain en sera exclu s'il ne s'adapte pas. Voici donc le récit de ce destin qu'on nous dit implacable, de son origine à son non moins implacable dénouement.
Pierre-Yves Gomez est essayiste et professeur à l'Emlyon, où il dirige l'Institut français de gouvernement des entreprises. Spécialiste du lien entre l'entreprise et la société, il a notamment publié : La République des actionnaires (2001) ; L'Entreprise dans la démocratie (2009) ; Le Travail invisible (2013) et Intelligence du travail (2016).
>>> Présentation (2mn) de "L' esprit malin du capitalisme" par Pierre-Yves Gomez
Voir la critique de l'ouvrage sur le blog émissaire
https://emissaire.blog/2019/11/08/le-misanthrope-le-liberal-et-le-neo-marxiste/#comments